Parti au hasard sur les routes de France, Rémi Petit a photographié des femmes, des hommes, jeunes ou moins jeunes, qui ont choisi de vivre de leurs savoir-faire manuels de façon locale. Pêcheur, relieuse, cordonnier, vannier, poissonnière, maraichère ou chirurgien, ils sont ceux qui façonnent le début de notre XXIe siècle. La découverte de leur atelier ou de leur lieu de travail est fascinante : un spectacle s’y organise autour des gestes et des outils, avec, au centre, l’humain qui façonne. Prendre le temps de le regarder, de la tête aux pieds, droit dans les yeux, dans son univers, pour ressentir sa présence au sein du monde qui l’entoure. Les photographies de Rémi Petit sont des face-à-face entre deux humains, le sujet et le spectateur, pour une rencontre qui touche au cœur. Il a tiré de ce reportage une série de portraits en couleur au format carré, auxquels s’ajouteront des photographies noir et blanc de l’environnement immédiat des ateliers.
« Ce travail s’intéresse à l’humain. En particulier aux femmes et aux hommes qui choisissent de vivre de ce qu’ils font de leurs mains de façon locale.
Cela signifie qu’ils rencontrent ceux à qui est destiné le fruit de leur travail.
Je vois ceci comme une manière d’être. Donc je photographie cet humain non pas quand il fait, mais debout, qui vous regarde, comme lorsque je le rencontre.
En le photographiant, j’en fais un symbole, car c’est un fait, la photographie, quand on l’expose, fabrique des symboles.
Nous vivons en société. La conscience de la portée de ses actes, et la conscience de l’autre sont des éléments clé de cette vie en société.
J’ai eu envie de faire de cet humain là un symbole de notre société, un symbole de nous, humains du XXIè siècle.
Un symbole qui semble être en décalage avec ce que nous montrent les médias de masse de l’humain d’aujourd’hui. D’ailleurs, ça m’a mis un doute…
Cette pensée-là, je l’avais en photographiant les gens autour de moi, mais peut-être est-ce une pensée autarcique ? Peut-être que je vis dans ma bulle, avec des œillères sur les yeux ? Alors je suis parti sur les routes, au hasard des rencontres, voir si cela existait ailleurs.
Une démarche à suivre, simple : demander à chaque personne que je rencontre et photographie de m’indiquer une autre personne vers qui aller. Ne faire qu’une seule photo par personne, mais photographier tout le monde de la même manière, debout dans le décor et la lumière de son atelier, pour conserver une certaine objectivité. Travailler en pellicule afin que la rencontre ne soit pas perturbée par l’envie de voir ou de refaire la photo.
Dans chaque pays où j’ai pu me rendre, j’ai appliqué cette démarche. Et j’ai pu satisfaire cette pensée : cet humain existe, et il existe ailleurs que dans ma bulle locale.
Dans l’hexagone, en suivant le fil de cette démarche, j’ai quasiment fait le tour du pays. Et en quatre ans de « missions photographiques » effectuées de façon un peu éparse, j’ai pu rencontrer plus de 200 personnes.
Pour cette exposition, j’ai choisi de vous emmener à la rencontre d’une soixantaine d’entre elles.
En route donc ! »
RÉMI PETIT